« Et ce jour, la jeune fille compris qu'il fut nul besoin de porter des talons pour faire tomber un homme à ses genoux»

vendredi, janvier 25, 2008

L'AMOUR ET LA FOLIE


Tout est mystère dans l'Amour,

Ses flèches, son carquois, son flambeau, son enfance ;

Ce n'est pas l'ouvrage d'un jour

Que d'épuiser cette science.

Je ne prétends donc point tout expliquer ici :

Mon but est seulement de dire à ma manière

Comment l'aveugle que voici

(C'est un Dieu), comment, dis-je, il perdit la lumière ;

Quelle suite eut ce mal, qui peut-être est un bien ;

J'en fais juge un amant, et ne décide rien.



La Folie et l'Amour jouaient un jour ensemble :

Celui-ci n'était pas encore privé des yeux.

Une dispute vint : l'Amour veut qu'on assemble

Là-dessus le conseil des dieux ;

L'autre n'eut pas la patience ;

Elle lui donne un coup si furieux,

Qu'il en perd la clarté des cieux.

Vénus en demande vengeance.

Femme et mère, il suffit pour juger de ses cris :

Les Dieux en furent étourdis,

Et Jupiter, et Némésis

Et les Juges d'Enfer, enfin toute la bande.

Elle représenta l'énormité du cas :

Son fils, sans un bâton, ne pouvait faire un pas :

Nulle peine n'était pour ce crime assez grande :

Le dommage devait être aussi réparé.

Quand on eut bien considéré

L'intérêt du Public, celui de la Partie,

Le résultat enfin de la suprême Cour

Fut de condamner la Folie

A servir de guide à l'Amour.




Jean DelaFontaine.
Raconte la moi encore..

Aucun commentaire: